L'Arsenal de Venise. Photo d'archive privée.

L'Ancien Arsenal de Jacopo de Barbari,1500, détail, Musée Municipal Correr.

Le Doge Ordelafo Falier. Email de la Pala d'Oro, Basilique Saint-Marc, Venise.

Domaines de la République de Venise après la quatrième croisade

Expansions du complexe de l'Arsenal - Perspective de la plante du XVIIIe siècle

Les darses de l'Arsenal. Photo d'archive privée.

Édifices et Ateliers. Photo d'archive privée.

Édifices et Ateliers. Photo d'archive privée.

Édifices et Ateliers. Photo d'archive privée.

Édifices et Ateliers . Édifice Squadratori. Photo d'archive privée.

Murs d'enceinte. Photo d'archive privée.

Mappe Maffioletti, 1797.

La 'Galeazza' vénitienne du XVIe siècle. Musée d'Histoire navale, Venise

Galère subtile vénitienne, modèle du Musée Historique Naval, Venise.

Fondaco des Turcs en 1870, après restauration.

Plan du Fondaco des Turcs en 1870, après restauration.

Le Fondaco de l'Allemand.

Fresque du Fondaco des Allemands.

L'Ecusson du Doge Ranieri Zeno.

Porte Magna vue des Maffioletti, 1790.

Le Doge Andrea Gritti à genoux face au lion de Saint Marc. Venise, Palais des Doges

Le 'squero' du Bucintoro. Photo d'archive privée.

Les 'gaggiandre', les chantiers de l�Arsenal de Jacopo Sansovino, 1568-1573, Arsenale Nuovissimo . Photo d'archive privée.

Musée d'Histoire navale et Campo San Biagio.

Le Panfilo Elettra de Guglielmo Marconi.
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L'Arsenal de Venise. Photo d'archive privée.


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L'Ancien Arsenal de Jacopo de Barbari,1500, détail, Musée Municipal Correr.


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Le Doge Ordelafo Falier. Email de la Pala d'Oro, Basilique Saint-Marc, Venise.


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Domaines de la République de Venise après la quatrième croisade


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Expansions du complexe de l'Arsenal - Perspective de la plante du XVIIIe siècle


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Mappe Maffioletti, 1797.


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La 'Galeazza' vénitienne du XVIe siècle. Musée d'Histoire navale, Venise


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Galère subtile vénitienne, modèle du Musée Historique Naval, Venise.


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Fondaco des Turcs en 1870, après restauration.


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Plan du Fondaco des Turcs en 1870, après restauration.


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Le Fondaco de l'Allemand.


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Fresque du Fondaco des Allemands.


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L'Ecusson du Doge Ranieri Zeno.


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Porte Magna vue des Maffioletti, 1790.


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Le Doge Andrea Gritti à genoux face au lion de Saint Marc. Venise, Palais des Doges


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Le 'squero' du Bucintoro. Photo d'archive privée.


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Les 'gaggiandre', les chantiers de l�Arsenal de Jacopo Sansovino, 1568-1573, Arsenale Nuovissimo . Photo d'archive privée.


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Musée d'Histoire navale et Campo San Biagio.


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Le Panfilo Elettra de Guglielmo Marconi.


L'Arsenal de Venise

L’Arsenal des Vénitiens (L’Arzanà de’ Viniziani)

La base et les fondements de cette République et même l’honneur de toute l’Italie… c’est la maison de l’Arsenal, qui doit être entendue comme Arx Senatus, c’est-à-dire forteresse, bastion, endroit fortifié et soutien du Sénat…
C’est avec ces mots que Francesco Sansovino –auteur du texte le plus beau et le plus célèbre qui ait eu Venise comme sujet, “Venetia città nobilissima” – définit, en 1581, l’Arsenal de Venise  .
Mais aucune description de l’Arsenal ne peut être aussi efficace que celle des vers de Dante Alighieri (Enfer, XXI, 7-15): “Quale nell’Arzanà de’ Viniziani/bolle d’inverno la tenace pece/a rimpalmare i legni lor mal sani/chè navigar non ponno; e’n quella vece/chi fa suo legno novo e chi ristoppa/le coste a quel che più viaggi fece;/chi ribatte da proda e chi da poppa;/altri fa remi e altri volge sarte;/chi terzeruol e artimon rintoppa”.
Comme chez les Vénitiens, dans l’Arsenal, bout en hiver la poix tenace, pour calfater les bateaux avariés qui ne peuvent plus naviguer – et pendant ce temps l’un remet son navire à neuf, et l’autre étoupe les flancs de ceux qui ont beaucoup vogué ; qui cloue la proue, qui radoube la poupe ; un autre fait des rames, un autre tord des cordes ; qui rapièce les voiles et de misaine, et d’artimon (Traduction de Jacqueline Risset, Flammarion, 1985).
Ce que Dante a vu et a  admirablement écrit a été, au moins pendant 400 ans, le plus grand complexe de production connu, le véritable centre névralgique de la puissance navale vénitienne et le spectacle le plus grandiose de l’intense activité industrielle de tout le Moyen âge.
La concentration d’ouvriers spécialisés dans les constructions navales, incomparables en termes de quantité et de qualité, l’organisation méticuleuse et le rendement stupéfiant dans la rationalisation du cycle de production, annoncent de façon prodigieuse et avec plusieurs siècles d’avance la chaîne de montage de l’époque industrielle et suscitent aujourd’hui encore l’admiration des historiens de l’architecture navale et sont l’objet d’analyses dans le cadre des études en sciences de l’organisation.
La vie de Venise, au cours des longs siècles de son extraordinaire histoire, s’est identifiée dans son Arsenal  , officine secrète de sa puissance navale et partie fondamentale du mythe de sa grandeur, admiré par les souverains, les hommes de lettres et les scientifiques de l’Europe tout entière, de Henri III de Valois, roi de France, à Henri VIII d’Angleterre, de Pierre le Grand de Russie à Gustave I° de Suède, de Dante à Léonard de Vinci.

Les événements historiques

En 2004, Venise a célébré les 900 ans de la fondation de l’Arsenal: on fait remonter en effet ses légendaires origines à 1104, pendant le règne du Doge Ordelafo Falier  , même si les premiers documents fiables sur l’emplacement d’un Arsenal de l’Etat vénitien sur le site actuel du quartier Castello, dans la partie la plus à l’est de la ville, remontent au XIII° siècle.
L’Arsenal est devenu le centre de la puissance impériale vénitienne  et le nœud logistique de tout le “Stato da Mar” de la République de Saint-Marc, quand Venise, après la quatrième croisade, a pris conscience de l’importance du pouvoir maritime, en misant sur la consolidation de la flotte et en donnant une extraordinaire impulsion au secteur des constructions navales.Avec l’expansion du pouvoir maritime vénitien, l’Arsenal s’est énormément développé  au cours de ses 900 ans d’existence, jusqu’à occuper, au moment de sa plus grande expansion, presque entièrement le bord au nord-est de Venise, ce qui correspond à environ 1/6 de la ville.
Chaque espace de cette vaste zone était admirablement exploité, avec l’emplacement rationnel de darsessqueri, chantiers navals de cales de halage, d’ateliers pour la construction, la réparation et l’entretien de la flotte: un complexe grandiose , aujourd’hui encore impressionnant pour les visiteurs, protégé par des canaux naturels et artificiels et par une immense enceinte de hautes murailles  crénelées de cinq kilomètres de longueur, dominées par quinze tours, où jour et nuit veillaient les sentinelles pour le protéger des regards indiscrets qui auraient pu dérober les secrets de la production d’une des flottes les plus extraordinaires de l’histoire navale  .
Même les structures urbaines environnantes étaient adaptées au grandiose Arsenal, avec les logements pour les ouvriers (les Arsenalotti, les bâtiments de service (greniers à blé, fours, dépôts de pain), et les activités induites et liées, dont il reste aujourd’hui encore des traces dans les toponymes fascinants comme: ruelle du plomb, des voiles, des ancres, du four, de la poix, fondamenta et place de la Tana, de l’ancien nom du fleuve Don (Tanai), d’où les Vénitiens importaient le chanvre pour les cordages.
La première extension significative du noyau le plus ancien de l’Arsenal (‘‘Vieil Arsenal’’) a été réalisée au XVI° siècle, d’abord par la construction de la ‘‘Tana’’ (aujourd’hui les « Corderies », espace grandiose utilisé aussi pour la « Biennale d’Art », puis par la création d’une nouvelle grande darse (aujourd’hui “Darse de l’Arsenal Nouveau) , qui a quadruplé la zone d’origine, permettant ainsi la construction de toutes les galères marchandes, quand l’expansion commerciale de Venise a atteint son apogée.
A l’aube du XV° siècle, Venise était au summum de sa puissance économique, politique et militaire et l’Arsenal –qui, en plus d’être une immense usine, était devenu aussi la base navale très dotée pour une flotte permanente d’une centaine de navires de combat et un formidable centre de production de bouches à feu- employait des milliers d’hommes, parvenant à mettre à l’eau même deux galères par jour.
Par la suite, l’Arsenal s’est spécialisé notamment dans la construction d’unités de guerre, et les galères vénitiennes sont devenues un prototype du navire de combat du Moyen-âge: une de ses variantes, la galéasse,  , qui a joué un rôle décisif dans la bataille navale de Lepanto (1571), a été un précurseur séculaire du cuirassé, le puissant navire de guerre conçu plus de trois cents ans après.
Le déclin de la Serenissima, lent mais inexorable, a commencé dès le XVII° siècle et s’est poursuivi pendant le siècle suivant, de sorte que, quand le drapeau de Saint-Marc a cessé de flotter sur les galères des ports de l’Orient, l’Arsenal aussi a commencé à perdre sa suprématie et a réduit de façon draconienne le nombre de ses ouvriers et son activité en tant que chantier et a été peu à peu dépassé par les critères de construction navale les plus modernes des puissances maritimes de l’Europe du Nord et pénalisé par une certaine tendance à l’immobilisme de Venise, orgueilleusement retranchée dans le système des ‘‘Mude’’, qui privilégie encore la construction des grosses galères pour les convois, alors que désormais ce qui prédominait, c’était la navigation libre avec l’usage de vaisseaux isolés plus agiles et à voile.Pendant l’annus horribilis de la République, le 1797, quand Venise comme Etat a cessé d’exister à cause de Napoléon, l’Arsenal a été entièrement dévasté par les envahisseurs français et il a fallu attendre la domination des Habsbourg pour enregistrer, à cheval entre le XVIII° et le XIX° siècle, une reprise des activités de chantier, qui, après une nouvelle brève parenthèse correspondant à l’occupation française, a continué jusqu’en 1848 quand, après l’avènement de l’éphémère République vénitienne de Daniele Manin, l’Autriche a déplacé ses chantiers en Istrie.
A la suite de l’annexion de Venise au Royaume d’Italie (1866), la Marine royale italienne s’est engagée à revitaliser l’ensemble de l’Arsenal, en compensant les exigences de restructuration, liées aux nouvelles technologies de la construction navale, par la volonté de rénover le complexe historique et monumental. C’est ainsi qu’à l’Arsenal s’est formé le premier véritable complexe industriel de l’Italie unifiée.
Aujourd’hui que les bases du pouvoir maritime et que les grands flux commerciaux ont changé de barycentre, l’ancien Arsenal de Venise continue à renfermer, dans ses nobles murs rouges, les traces de siècles d’histoire du bateau méditerranéen: toute la famille des barques à rames, des galères fines et grosses, des galéasses, des galeotte, des fuste, des bricks et des frégates à rames; la famille des bateaux ronds de marchandises: cocche, caracche, marcigliane et buzi; la famille des bateaux à voiles: galeoni, frégates, vaisseaux,  sciabecchi, polacres, bombardes, bricks à voiles, et enfin les grandes nouveautés du XIX° siècle: les bateaux à vapeur, les paquebots à roues, les cuirassés, les torpilleurs, les sous-marins.

L'organisation

Les historiens de Venise ont l’habitude d’expliquer la supériorité politique de la Sérénissime non seulement par l’excellence et la constance des institutions lagunaires, mais surtout par l’harmonie sociale entre sa classe dirigeante et les classes populaires: au milieu de nations encore sauvages et déchirées par des luttes féodales, Venise est devenue une seconde “terre promise”, où ont convergé des populations de toutes les origines et où le peuple et les gouvernants ont travaillé dans une rare entente.
L’Arsenal a été le modèle de cette osmose civile entre les différentes classes sociales: bien évidemment il s’est servi de l’habileté incomparable de ses architectes navals, mais le véritable secret de la titanesque officine de navires commerciaux et de guerre décrite par Dante a été surtout constitué par l’organisation, la rationalisation et la spécialisation au cours des phases de construction des ouvriers de l’Arsenal – ouvriers chargés du calfatage, tourneurs, charpentiers, marangoni, constructeurs de rames, forgerons, scieurs, cordiers, manœuvres, etc – les célèbres “arsenalotti”, un corps d’hommes à l’habileté technique extraordinaire, qui se transmettait d’une génération à l’autre, en même temps que les secrets du travail, l’orgueil d’appartenir à une sorte de milice civile au service exclusif de l’Etat.
Centre névralgique de la magnifique usine, les “arsenalotti” formaient une véritable caste insérée dans un livre d’or, qui bénéficiait d’avantages alléchants: un salaire excellent, le logement garanti, un avenir sûr pour leur famille et pour leurs descendants et ils constituaient la garde armée la plus fiable du Gouvernement vénitien, mais en échange ils garantissaient une fidélité absolue, sans quoi ils s’exposaient aux sanctions les plus terribles. Un manœuvrier imprudent ou un mastro infidèle pouvait payer de leur vie ou par la mise au ban leurs méfaits et, pour éviter des malversations et des vols, même le plus petit outil y compris les clous étaient marqués par le sceau du lion ailé.
L’ouvrier de l’Arsenal, après six ou sept années d’apprentissage devenait mastro, et parmi les maîtres les plus réputés et les plus expérimentés étaient choisis les Proti, dont dépendaient l’élaboration et la production du navire, mais aussi la direction de tout autre travail. Les quatre protes les plus importants (ceux des "marangoni", charpentiers navals, des "calafati", ouvriers chargés du calfatage, des "alberanti", ouvriers chargés d’installer les mâts, et des "remieri", ouvriers chargés de construire les rames) formaient le conseil technique des Patroni ou Provveditori. Un autre échelon de la carrière des protes était celui des Stimadori, qui estimaient la validité du travail fini des ouvriers et des Appontadori, qui faisaient le contrôle du travail et surveillaient si les horaires étaient respectés. Les sommets de l’organisation étaient constitués par les trois Patroni (Patron in Guardia, qui surveillait la fermeture des entrepôts et les services de garde de l’Arsenal, Patron in Banca et Patron Casser, qui veillaient aux navires et au matériel qui devait être livré, contrôlaient les finances et le budget de l’usine) et par les trois Provveditori, qui s’occupaient de la gestion suprême de l’Arsenal, tenaient les contacts avec les Patrons et le Sénat, proposaient des lois et exerçaient l’autorité sur toutes les places-fortes de la République.
Le fonctionnaire le plus important de l’Arsenal était, enfin, l’Amiral, qui s’occupait de ce qu’on définirait dans le langage moderne des entreprises la gestion de la “qualité totale” de la production. Le titre de « Magnifique » qui lui avait été conféré et le rang qu’il occupait dans le cérémonial, à côté du Doge, feraient supposer qu’il appartenait au patriciat, mais l’Amiral provenait au contraire du bas de la hiérarchie, après avoir gravi tous les échelons de la carrière des ouvriers: un exemple de méritocratie.
La véritable originalité des processus de production de l’Arsenal, où l’osmose entre les classes dirigeantes et les ouvriers constituait le véritable “facteur de puissance”, consistait aussi bien dans le caractère systématique et la concentration des phases du travail au même endroit que dans l’attention méticuleuse accordée à chaque étape de la filière de production, depuis le choix des chênes dans le domaine forestier sur la Terre ferme : cela permettait une rapidité et une qualité du processus de construction de la flotte inégalables.

Les transports maritimes vénitiens

Un autre facteur déterminant de la suprématie maritime vénitienne, en plus du développement de l’industrie des constructions navales, a été l’organisation des transports maritimes, dans laquelle l’Etat vénitien est intervenu avec une série de mesures de protection, au moyen de privilèges, de subventions et même de protections armées.
Dans aucun autre endroit comme à Venise, l’industrie des constructions navales n’a été si sujette à la sphère publique, et non seulement à cause de la flotte de guerre, la seule au monde complètement dépendante de l’Etat, mais aussi à cause de la flotte marchande, souvent protégée et subventionnée par des fonds publics.
La législation protectionniste de la République de Saint-Marc attribuait à la flotte vénitienne le monopole du trafic maritime des marchands vénitiens et au port de Venise un rôle d’escale obligatoire pour toute la navigation marchande dans l’Adriatique. Les droits qui en résultaient enrichissaient les finances publiques et étaient réinvestis, créant ainsi un dynamisme économique et financier créateur de richesse, qui n’éloignait pas les marchands étrangers, encouragés même par des infrastructures qui leur étaient réservées  (par exemple le  Fondaco des Allemands ou celui des Turks).
Le commerce maritime bénéficiait de plus de la protection publique avec la mise en place des “mude”, lignes régulières de navigation (les premières sur les routes du Levant, puis sur celles de l’Atlantique de Flandre et d’Angleterre) pour le transport par mer de marchandises prisées, effectué avec de grosses galères construites à l’Arsenal, louées par l’Etat vénitien, et protégées de la navigation en convois escortés militairement, pour se défendre des corsaires, des pirates et des puissances concurrentes.
La protection donnée à sa flotte marchande et aux équipages formés de marchands-marins a eu une incidence sur le droit maritime vénitien, même dans les rapports hiérarchiques traditionnels à bord: le code maritime du Doge Zeno  (1255), par exemple, s’occupait des droits de l’équipage beaucoup plus que des pouvoirs du capitaine, et les marins étaient d’ailleurs tenus à dénoncer les violations du règlement qu’il pouvait faire. Bref, de par la loi, les marins étaient responsables de la discipline du capitaine autant que le capitaine l’était de celle de l’équipage.

Le complexe historique et monumental

Aucun étranger de passage à Venise n’aurait négligé de visiter l’Arsenal, qu’il se soit agi d’un roi, d’un empereur, d’un marchand ou d’un pèlerin. L’Arsenal, qui se présentait aux yeux des visiteurs comme un majestueux complexe architectural, a joué aussi un rôle dans la célébration de la grandeur de la Sérénissime, témoin vivant du mythe de la “dominante”, du pouvoir maritime de Saint-Marc et de son bon gouvernement.
Un symbole de cette grandeur est la magnifique Porta Magna  , l’entrée monumentale de l’Arsenal, qui a été la première architecture de la Renaissance au XV° siècle à Venise et qui aujourd’hui encore se présente dans toute sa majesté: un arc de triomphe, bordé par des colonnes doubles en marbre qui soutiennent des chapiteaux au style vénitien-byzantin, et couronné par un attique avec frontispice sur lequel trône un grand lion de Saint-Marc, pour évoquer que tout à Venise –même le fier Arsenal et le Doge, à genoux  lui aussi devant le lion de Saint-Marc sur la façade du Palais des Doges est soumis à l’intérêt public de l’Etat.
Au-delà de l’entrée monumentale, l’Arsenal apparaît comme un immense musée en plein air, où chaque édifice et chaque darse est partie intégrante de la collection. Au milieu de plusieurs hangars et de squeri/chantiers  qui donnent sur la darse du Vieil Arsenal, ressort le charme de la pierre d’Istrie de la “maison du Bucintoro”, où est mise en dépôt l’embarcation qui sert à la cérémonie du Doge, à partir de laquelle chaque année, le jour de l’Ascension, le Doge jetait dans la lagune une alliance comme symbole des « épousailles » de Venise avec la mer.
D’autres structures magnifiques liées à la filière de production des embarcations sont les suivantes: l’édifice des Squadratori (Tailleurs), dans le canal des galéasses, où on taillait le bois, et -dans la zone de l’Arsenal Nouveau- les Corderies de la Tana, où on conservait le chanvre et où on tordait les amarres pour les bateaux et où se déroulent actuellement des expositions temporaires, dont la “Biennale d'arte”.
Au nord de l’Arsenal Nouveau, où la grande darse est appelée “Très Nouvel Arsenal”, on trouve les “Gaggiandre”  , deux grandioses chantiers aquatiques aux caractéristiques architecturales particulièrement fines, construits de 1568 à 1573 d’après un projet attribué à Jacopo Sansovino.
Aujourd’hui le grandiose complexe de l’Arsenal est en partie le siège du “pôle culturel” de la Marine militaire, avec l'Istituto di Studi Militari Marittimi (Institut d’études militaires maritimes) et le Museo storico navale (Musée historique naval), dont le siège se trouve sur la place de San Biagio Campo, à proximité de l’Arsenal dont il est le pendant pour un endroit extraordinaire du souvenir des fastes navals vénitiens, et c’est le plus grand en Italie et l’un des plus riches au monde dans son genre.
Situé dans un bâtiment du XV° siècle, qui servait jadis de grenier, le "Museo Storico Navale"  possède un espace d’exposition qui s’étend sur cinq niveaux pour un total de 42 salles, et qui comprend,, en plus de ce qu’on appelle le “Pavillon des Navires”, situé dans l’ancien Atelier de construction des Rames de l’Arsenal, l’église San Biagio (XI° siècle), lieu de culte traditionnel de la Marine vénitienne.
Les trois premiers niveaux du Musée conservent les témoignages d’entreprises navales, de personnages, d’armes et d’équipements navals de Venise, comme des exemplaires d’authentiques embarcations typiques vénitiennes et de parfaites reconstructions à l’échelle d’une trirème, d’une galéasse (le navire vénitien impliqué dans la bataille navale de Lépante en 1571) et du Bucintoro.
D’autres reliques ont trait à des modèles et à des objets d’embarcations pour la pêche et à d’autres typiques embarcations de la lagune vénitienne, comme les gondoles auxquelles est consacrée une salle tout entière, des modèles précieux de jonques orientales, des reliques, des modèles et des tableaux des anciennes Républiques Maritimes et de la Marine royale, alors que la salle suédoise, au quatrième étage, est consacrée aux liens solides entre la Marine vénitienne, puis italienne et la Marine suédoise, construite avec l’apport des industries navales italiennes.
Dans le “Pavillon des Navires” de l’atelier de construction des Rames qui a accueilli temporairement le grand Conseil après l’incendie du Palais des Doges en 1577, sont conservées d’authentiques embarcations typiques vénitiennes, des unités militaires, et une partie de la salle des machines du yacht Elettra de Guglielmo Marconi.

Arturo Faraone

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